James
Ensor est né à Ostende en 1949; Figure originale il domina la peinture
belge de son époque. Il commença à peindre sous l'influence de Manet et
Degas et des symbolistes de l'époque qui renoncèrent à exprimer les
apparences au profit des idées. Sa particularité se trouve dans
l'exceptionnelle ardeur vitale qui lui fait apprécier les êtres et les
choses jusque dans les aspects les plus positifs et matériels dans un
débordement de joie qui entraîne tout et chacun dans des rondes
triomphantes.
On a comparé sa carrière à un film montrant à l'accéléré près d'un
demi-siècle de peinture, allant du naturalisme à l'expressionnisme et au
surréalisme en passant par l'impressionnisme, le symbolisme et le
fauvisme. On ne peut donc associer son nom à un style pictural défini; il
les transcende tous. Méconnu pendant ses années de génie, il fut fêté dans
sa vieillesse, alors qu'il ne faisait que se survivre.
1°
Tendance IMPRESSIONNISTE
Lors de l'exposition des peintres impressionnistes français à Bruxelles,
beaucoup d'artistes découvrirent leur technique et leurs couleurs
éclatantes. Ensor aussi, suit cette tendance, tout en restant très loin
des œuvres françaises. En 1886, il éclaircit sa palette, et réalise des
études sur la lumière, omniprésente et astucieusement brossée, dans de
grandes compositions extérieures.
On dira d'Ensor qu'il pousse l'impressionnisme jusqu'au tachisme. La Chute
des anges rebelles (1889), La Tentation de saint Antoine (1887) sont en
effet tachistes et plus que fauve.
2°
Tendance SYMBOLISTE
C'est dans le contexte du symbolisme que se comprennent le mieux les
grands thèmes ensoriens: le masque , le Christ, le squelette,
l'autoportrait;Née au sein du mouvement symboliste belge,cette thématique
se précise : Le masque, d'abord ornement, ne tarde pas à devenir humain.
La face humaine lieu par excellence d'expression est assaillie et portée
vers ces ultimes retranchements. Elle exprime la laideur, les grimaces ,
les tares et les angoisses. C'est la nature qui se désagrège qui fond en
pourriture. C'est l'essence même de la vie qui est gangrenée par l'absurde
et que seule une sagesse suprême peut sauver. Le masque est devenu pour
lui le symbole de l'hypocrisie,
3°L'influence
des peintres flamands ses aînés
Les peintres flamands, ses aînés, dont la caractéristique la plus
marquante demeure le goût de la truculence de la kermesse sont aussi ceux
qui abordent la vie avec la plus ardente piété. James Ensor repris La cene
dernier repas du Christ comme le fit les peintres belges, ses aînés,
ci-dessous mentionnés ( P.Coecke, De Groux, J.Smits et E. Tytgat). Il
donne comme eux un sens sacré aux victuailles, une valeur d'aliment
spirituel. C'est le poisson emblème des premiers chrétiens qu'il porte sur
la toile illustrée ci-dessous.
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L'influence de Jérôme Bosch
Cette foule grouillante d'êtres absurdes qui entoure le chemin de croix du
Christ illustré ci-dessous a influencé James Ensor dans son oeuvre de
l'entrée du Christ à Bruxelles Une porte s'ouvre sur un monde . Le réel et
l'irréel se toisent. Dans la mêlée du calvaire du Christ souffrant de
Jérôme bosch se débattent les hommes à gueules de haine et de vengeance.
"L'art belge verse à tout moment dans la démesure" écrit Paul Hensaerts;
Ses artistes se mettent à empoigner la vie en une ardeur brutale: le
chahut de ses fêtes, ripailles et kermesses en sont le thème le plus
usité. Ensor n'échappe pas à cette avidité primitive. Il reprend dans ses
visages ci-dessous exposés l'observation de Jérôme Bosch qui avec une
ironie attristée exprime dans ses visages grimaçants des agissements des
hommes.
L'influence de Goya
José de Goya peignit ce tableau des vieilles au miroir au cours des six
années de retraite dans la maison du sourds où il fut exilé atteint de
demi paralysie et de surdité. Ces femmes qui voient les ravages du temps
dans un miroir ont influencé James Ensor aux heures les plus agitées de sa
vie; cet artiste marginal et irritable se sent de plus en plus rejeté et
méprisé. Il s'isole de plus en plus des autres artistes, même des plus
novateurs, ne parvenant pas à extérioriser ses frustrations de jeunesse
alors qu'il était refusé aux Salons, et que la presse le tournait en
dérision. Il peignit ces squelettes et ces loqueteux . Ainsi, Le
sarcastique Ensor se pose l'ultime question de l'absurdité du monde et des
ravages des êtres.
En vieillissant, Ensor sera tenté par le théâtre et composera la musique,
les costumes et les décors d'un opéra-ballet, La Gamme d'amour. Tout au
long de sa vie, il fut aussi paysagiste, peintre de la mer et des dunes.
Paradoxalement, ses plus beaux paysages luministes sont des eaux-fortes.
Son œuvre gravé compte d'ailleurs cent trente-trois planches, à propos
desquelles on peut évoquer Goya;
L'art Belge: Ensor juste après
Rubens
Bien qu'il n'ait pas formé d'élève, tous les peintres belges
contemporains se reconnaissent une dette à son égard. Son influence fut
très grande dans les pays germaniques et nordiques ainsi qu'aux
États-Unis. Il fut le " précurseur " de nombreux peintres : Frits Van den
Berghe et Alechinsky, Nolde, Heckel, Grosz, Kubin, Klee, Jorn... Peintre
des masques et des squelettes, individu solitaire, tourmenté par ses
démons, il incarne l'inquiétude moderne, l'esprit de provocation, le
conflit entre l'artiste et la société. Ses incursions dans le fantastique,
sa fuite hors du réel touchent la sensibilité contemporaine plus que
l'évasion d'un Gauguin vers un Éden mythique. En 1929 il est anobli au
titre de Baron. sa flamme artistique s'éteint progressivement . Il meurt
dans sa ville natale en 1949.
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